Textes de positionnement de l'éducation aux médias

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Publication:
09/05/2022  - 
Date de la séance:
 
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Abstract
Afin de pouvoir mettre en œuvre les outils utiles à l'éducation aux médias, il était nécessaire de cerner l’évolution, les effets et les usages des médias. Les textes de positionnement sont le fruit de cette réflexion.

De la nécessité des textes de positionnement

Le développement et l’évolution des médias (presse, téléphone, cinéma, radio, télévision, jeux vidéo…) ont bouleversé l’environnement des citoyens du 21e siècle et contribuent aux mutations de la société contemporaine.

Le citoyen est confronté à de nouvelles situations et de nouveaux enjeux médiatiques dont il ne maîtrise pas forcément les dimensions  technologiques, sociales, juridiques et éthiques de leurs usages.
 
L’objectif de l’éducation aux médias est de développer une appropriation critique de ces médias, qui permette d’en apprécier toutes les richesses et d’en faire un usage responsable tout en percevant avec justesse les limites et les travers.

Afin de pouvoir mettre en œuvre les outils utiles à cette éducation, il était nécessaire de cerner l’évolution, les effets et les usages des médias. Les textes de positionnement sont le fruit de cette réflexion.

L'éducation aux médias: définition

L’éducation aux médias est l’ensemble des pratiques visant le développement des connaissances, des compétences et des pratiques médiatiques de leurs bénéficiaires (désignées par l’expression « littératie médiatique ») dans le but de rendre ceux-ci actifs, autonomes, critiques, réflexifs et créatifs dans leurs usages des médias.

Elle porte sur :

  • les contenus médiatiques et les langages (écrits, sonores, visuels, multimodaux), formes et genres qu’ils mobilisent
  • les contextes de production, de diffusion et de réception des médias dans leurs dimensions sociales, économiques et culturelles
  • le fonctionnement technique des outils, dispositifs et plateformes médiatiques et leurs enjeux

Elle concerne toutes les formes de communication médiatisée, publiques ou privées, informatives, persuasives, divertissantes, ludiques, culturelles ou sociales. Elle couvre par conséquent toute la diversité des médias: notamment la télévision, la presse, la radio, les podcasts, le cinéma, les réseaux sociaux, les plateformes et les jeux vidéos, ...

Elle rend ainsi ses bénéficiaires aptes à faire usage des médias en tant que destinataire, usager, créateur ou contributeur. L’éducation aux médias leur permet de considérer les médias comme des constructions techniques, informationnelles, économiques, culturelles et sociales complexes qui contribuent à façonner la réalité sociale.  De cette façon, elle leur permet de déconstruire les représentations qu'ils véhiculent, d'exercer sur eux un jugement critique et de développer une posture réflexive sur leurs propres usages et représentations.

Ce faisant, elle prépare chacun.e à être un.e citoyen.ne responsable, capable de jouer un rôle actif dans une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte à l’interculturalité, en contribuant à leur assurer des chances égales d’émancipation sociale.

Le Conseil Supérieur de l’éducation aux médias

16 mars 2022

Éduquer au cinéma

L’éducation au cinéma devrait favoriser chez le spectateur une approche active et critique de l’image animée et du son. Par le terme «critique», on ne vise pas l’analyse critique du film mais bien le développement de l’esprit critique, du jugement sociologique du spectateur face à toute production cinématographique et plus largement médiatique. Dans l’ensemble de la production audiovisuelle et médiatique, le cinéma se caractérise par les critères suivants:

  • La dimension socio-économique qui caractérise la production, la distribution, la diffusion cinématographique;
  • Le point de vue de l’auteur ;
  • Le caractère non personnalisé de la communication cinématographique ;
  • La perspective du ou des publics ;
  • L’approche combinée et active de l’image et du son (langage) ;
  • L’unité du discours (narrative, esthétique, argumentaire).

Enfin, les critères devront prendre en compte ce qui distingue l’objet cinéma des autres productions médiatiques.

Objectifs

L’éducation au cinéma devrait notamment aider le spectateur à donner un sens au film, à mettre en perspective son contenu et sa forme, à relativiser ses propres émotions et son premier regard sur l’œuvre, à motiver une adhésion ou un rejet. Eduquer au cinéma, c’est contribuer à donner au spectateur, face au film, un regard critique et un rôle de co-énonciateur grâce à une appropriation de l’œuvre en tant que récepteur. C’est l’aider à identifier le point de vue du réalisateur et les éléments de langage mis en œuvre par ce dernier pour faire passer ce point de vue auprès de son public. C’est également le rendre capable de cultiver son plaisir, d’exercer et d’affiner son jugement, de construire son expertise en devenant un cinéphile curieux.

Mais l’éducation au cinéma peut également poursuivre un objectif d’un autre type, complémentaire : faire en sorte que le spectateur/récepteur puisse, s’il le désire, devenir à son tour émetteur. Dans ce cas, il importe qu’il acquière les compétences nécessaires à l’expression et à la communication par l’image animée et le son tout en s’appropriant les fonctionnalités des nouveaux outils.

Eduquer au cinéma à l'ère numérique

De nos jours, une éducation au cinéma doit prendre en compte les nouvelles déclinaisons de l’image et l’émergence des médias numériques. 

En quelques années, cette émergence a largement modifié le domaine qui nous occupe. Le texte cinématographique a vu ses modalités d’écriture, de production, de diffusion et de projection se transformer profondément. Ces changements ont engendré des perceptions et des pratiques nouvelles. L’éducation au cinéma est ainsi devenue un véritable lieu de convergence et d’intégration des technologies de l’information et de la communication, ainsi que des pratiques qui en sont issues.
Plusieurs facteurs participent à cette mutation profonde :

  • Le développement exponentiel des techniques numériques et l’accès démultiplié qu’il offre au patrimoine cinématographique mondial ;
  • Les progrès de la vidéo-projection et des dispositifs comme le home cinéma au plan de la qualité de la diffusion image/son ;
  • Les sites de mutualisation des ressources ;
  • La banalisation des nouveaux outils numériques de prise de vue et de montage permettant l’accès simplifié à l’autoproduction ;
  • L’intégration dans une même création de différentes sources et types de contenus – textes, images d’archives, son, images en live, schémas ;

La numérisation est venue irriguer l’ensemble des activités de visionnement, de recherche documentaire sur des films et réalisateurs, de mise en images et en sons, d’échanges cinéphiles.

Ces applications de la révolution numérique ont induit de nouveaux comportements, collectifs ou individuels, une cinéphilie plus ouverte et plus diversifiée et qui s’adapte au formatage d’une image se pliant elle-même à la multitude des écrans, ceux de la salle obscure, de la TV, de l’ordinateur, du GSM ou de la console de jeux vidéo…
L’éducation au cinéma doit, elle aussi, prendre en compte ces mutations comportementales et technologiques.

Pour de nouvelles stratégies

Il importe désormais de mettre en place les nouvelles stratégies d’une cinéphilie évoluant au gré de ces mutations.
Théorie et pratique, visionnement collectif et individuel, images du cinéma « des premiers temps » et images hybrides que nous côtoyons au quotidien, œuvre globale et extraits significatifs doivent se rejoindre et se fondre dans un réseau de ressources complémentaires, de lieux, de méthodes d’analyse ou de réalisation.

Médias en Réseaux

Le développement d’Internet et des médias en réseaux a bouleversé l’environnement médiatique des citoyens du 21e siècle, et en conséquence, leurs relations au monde et aux autres. Cette révolution s’inscrit dans la longue évolution des médias modernes qui ont contribué aux mutations de la société contemporaine: presse, téléphone, cinéma, radio, télévision, jeux vidéo… L’objectif de l’éducation aux médias est de développer une appropriation critique de ces médias, qui permette d’en apprécier toutes les richesses et d’en faire un usage responsable tout en percevant avec justesse les limites et les travers. Ce mouvement d’appropriation doit se poursuivre avec les Médias en Réseaux.

Un nouveau défi

La mutation des médias en réseaux marque un tournant dans l’histoire des relations entre humains et de ce fait entre les humains et les médias. En effet, grâce à un très grand développement de l’interactivité, chacun a la possibilité de prendre une part active à la communication médiatique, et d’agir non seulement en tant que lecteur mais également en tant que producteur, organisateur, diffuseur, contributeur, organisateur, médiateur, transmetteur… de messages textuels, visuels et sonores. De plus, il peut désormais le faire à tout moment et en tout lieu, grâce au développement des technologies mobiles. Cette évolution constitue un nouveau champ pour l’éducation aux médias, d’autant que les médias en réseaux intègrent et transforment progressivement les médias apparus précédemment.

Des situations inédites

Puisque les médias en réseaux favorisent considérablement la communication, l’expression et la création médiatiques, ils nécessitent une responsabilisation des utilisateurs. Ceux-ci sont confrontés à de multiples situations nouvelles dont ils ne mesurent pas toujours les enjeux, par méconnaissance des dimensions technologiques, sociales, juridiques et éthiques de leurs usages. Dans ce cadre, plusieurs questions spécifiques peuvent être soulignées :

  • la mise en ligne très aisée et instantanée de contenus permet une communication quasiment en temps réel, dont l’attrait est indéniable mais dont il n’est pas toujours facile d’anticiper les effets. Par exemple, l’utilisateur est confronté à la pérennité des informations produites, parfois difficiles à modifier ;
  • tant au niveau du fond que de la forme, les contenus peuvent être très facilement dupliqués, modifiés ou transférés dans d’autres contextes qui peuvent en modifier le sens ou la perception;
  • la nécessité de gérer son identité numérique ainsi que sa socialisation numérique, ses avantages et ses risques (cyberharcèlement, anonymat, incitation à la haine,…);
  • les implications juridiques des usages en réseau sont souvent méconnues des utilisateurs et posent parfois de nouvelles questions de droit;
  • l’accès à une masse d’informations considérable et de nature extrêmement diverse suppose des démarches complexes d’évaluation des contenus, parfois élaborés selon des logiques collaboratives, et d’identification des auteurs (pseudos, avatars, anonymat…). Les représentations et les stéréotypes, notamment dans le domaine de la construction et la représentation de soi en ligne, nécessitent de nouvelles formes de critiques.
  • la publicisation des communications privées et la traçabilité des données personnelles favorisent de nouvelles formes de surveillance (sociales, commerciales, étatiques…)

Il importe que les utilisateurs en prennent conscience et exploitent les médias en réseaux en connaissance de cause.

Des enjeux socio-économiques

D’autre part, les utilisateurs des réseaux doivent être en mesure de comprendre et d’analyser de façon plus experte le fonctionnement et les conditions d’utilisation des plateformes, notamment en termes de confidentialité, de modèle économique et le rôle de la publicité.
Il importe de comprendre que l'infrastructure technique des réseaux repose sur des intermédiaires techniques dont le rôle, plus proche de l'hébergeur que de l'éditeur d'information, est différent de celui des médias précédents. A condition d'être attentif aux stratégies de ces entreprises, le consommateur peut tenter, collectivement, de contribuer à faire prévaloir les exigences de l'intérêt général.

Vers demain

Les enjeux de l’éducation aux médias en réseaux sont donc multiples, complexes et cruciaux. Ils nécessitent de connaître les outils technologiques et leur fonctionnement, d’observer la façon dont ils sont utilisés et de saisir les questions qu’ils posent, afin de proposer aux utilisateurs des repères pour une utilisation autonome, critique et responsable.
Enfin, à travers leurs fonctions d’information et de socialisation, les médias en réseaux posent plus sensiblement les enjeux d’un vivre ensemble. Une citoyenneté active qui se vit au cœur des pratiques : culture du débat démocratique, bonne gouvernance, responsabilités, respect, interculturalité... Autant de dimensions qui favorisent des compétences citoyennes en devenir.